Pour avoir verrouillé la manette de sa PS4, Sony écope d'une amende de 13,5 millions d'euros


Des bugs, un système de licence opaque… Sony a empêché, par divers moyens, le développement de manettes concurrentes, compatibles pour la PS4. La société écope d’une sanction salée : 13,5 millions d’euros pour abus de position dominante, annonce ce 20 décembre l’autorité de la concurrence française. Retour sur ce qui a conduit cette autorité à conclure que « le comportement anticoncurrentiel de Sony (est) particulièrement grave ».

S’il n’est pas interdit à une société d’être en position dominante, œuvrer en coulisses pour faire dysfonctionner les manettes de ses concurrents l’est. C’est ce que vient d’apprendre à ses dépens Sony, le fabricant de la Playstation. Ce mercredi 20 décembre, l’Autorité de la concurrence française a condamné le géant japonais à payer une amende de 13,5 millions d’euros pour avoir abusé de sa position dominante sur le marché des manettes des PS4. Concrètement, Sony a manœuvré pour que les utilisateurs de cette console se détournent des manettes moins chères que celles proposées par le géant japonais, selon le gendarme de la concurrence – que cela soit celles directement fabriquées par la société, ou celles vendues sous licence officielle.

Pour les fabricants de manettes compatibles avec la PS4, le marché était verrouillé ou difficilement accessible en raison de deux pratiques mises en place par Sony. Le géant japonais aurait non seulement mis en place volontairement des bugs de la Playstation 4, si les manettes utilisées étaient fabriquées par des tiers – sans licence officielle. Mais l’accès à ces licences officielles aurait été plus qu’opaque, relève l’autorité de la concurrence, dans son communiqué du 20 décembre.

Tout commence en 2013 : Sony commercialise la PS4, avec la manette DualShock 4. Si le géant japonais dispose au début de brevets qui couvrent ce type de manettes, et qui lui permettent d’être quasiment seul sur le marché, ses titres de propriété intellectuelle expirent : de quoi inciter d’autres fabricants à se lancer à l’assaut de ce marché. Quelques mois plus tard, ils proposent des manettes pour PS4 compatibles et moins chères que celles de Sony, à l’image de Subsonic, une société française. Cela n’est évident pas du goût du géant japonais qui va mettre en place des « mesures » que l’autorité française a jugé anti-concurrentielles.

Deux pratiques de Sony mises en cause

Car si être en position dominante sur un marché est tout à fait licite, il n’est pas permis d’empêcher des concurrents d’y accéder, ou de les discréditer par des manœuvres en coulisse. Constatant des dysfonctionnements entre sa manette et la PS4, Subsonic tente de rejoindre le programme de licence officielle de Sony. En vain : le fabricant ne parvient pas à obtenir les critères d’adhésion de la part de l’entreprise japonaise, précise l’autorité. Il ne peut donc pas y adhérer. La société française saisit alors le gendarme de la concurrence, expliquant que Sony fait volontairement dysfonctionner ses manettes. Ces bugs ont des conséquences pour ces entreprises qui doivent conquérir de nouveaux clients – à savoir, être discréditées.

Et après des années d’enquête sur des faits allant de novembre 2015 à avril 2020 – soit la majeure partie de la commercialisation de la PS4 – l’autorité de concurrence lui a rendu raison, ce mercredi 20 décembre 2023. Elle estime qu’à partir de novembre 2015, Sony a bien mis en place « un dispositif de contre-mesures techniques » au prétexte de lutte contre la contrefaçon. Mais en arrière-plan, le système déconnectait les manettes proposées par des fabricants tiers à chaque mise à jour du système d’exploitation de la console. Pour l’utilisateur, c’était des bugs à répétition et des problèmes de synchronisation. Pour le gendarme de la concurrence français, Sony a fait comme si toutes les manettes alternatives étaient des contrefaçons de ses marques et brevets. Mais « les brevets invoqués par Sony ont expiré pendant la période des pratiques ou étaient sur le point d’expirer. Les contre-mesures techniques pouvaient par conséquent avoir pour effet de prolonger les droits exclusifs conférés par les brevets, même une fois l’invention tombée dans le domaine public », déplore l’autorité.

Deuxième problème : l’octroi de licence officielle pour fabriquer des manettes de PS4 était opaque. Sony a par exemple refusé de « communiquer aux fabricants qui en faisaient la demande les critères d’accès au partenariat de Sony appelé OLP ». Or, c’était le seul moyen d’obtenir la fameuse licence officielle, et « d’éviter les déconnexions ».

Sony autorité de la concurrence
© Autorité de la concurrence. Capture d’écran du communiqué du 20 décembre.

La combinaison de ces deux pratiques, écrit l’autorité, « a significativement nui à l’image de marque des fabricants tiers affectés, tant vis-à-vis des joueurs que vis-à-vis des distributeurs, freinant leur expansion sur le marché et conduisant à leur possible éviction ». Les utilisateurs ayant subi plusieurs bugs n’ont pas racheté des manettes compatibles. Et leurs commentaires négatifs ont pu dissuader d’autres utilisateurs de procéder à un tel achat, écrit l’autorité. Pour cette dernière, « le comportement anticoncurrentiel de Sony (est) particulièrement grave ». D’où cette sanction élevée : 13 527 000 euros à payer solidairement entre la société mère du groupe Sony et trois filiales – dont une française.

Source : Communiqué de l'autorité de la Concurrence du 20 décembre 2023



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Catégorie article Jeux

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